Japon, Australie et l’ASEAN
Un pôle sécuritaire en formation, Rémi Perelman, Asie21, janvier 2017
Visites. Du 12 au 17 janvier 2017, Shinzo Abe, le Premier ministre japonais, s’est rendu successivement aux Philippines, en Australie, en Indonésie et au Vietnam alors que les États-Unis de Trump annoncent leur volonté de se désengager de l’Asie. Ces visites successives avaient deux objectifs : d’abord resserrer les liens du Japon avec ces pays en matière de sécurité et de développement économique. Le renforcement du partenariat nippo-australien, deux alliés historiques de Washington, comprends l’intensification de la coopération militaire, notamment navale, avec les pays de l’ASEAN et sans doute avec l’Inde.
Chine. Ces accords, partenariats, ou autres alliances de nature défensive sont destinés à prévenir la tendance de Pékin d’arrondir son empire en marchant sur les pieds de ses voisins (tactique dite du salami). On gardera en tête que chacun des pays concernés par la tentative australo-japonaise de s’en préserver (y compris ces deux-là), ont par ailleurs des liens commerciaux avec la Chine, ce qui rend la manœuvre délicate voire fragile. Mais en Asie, hormis lors de conflits déclarés, l’économie peut rester découplée de la situation militaire. Ainsi, le fait que la Chine et l’Indonésie soient des partenaires aux relations économiques étroites, Jakarta n’a pas hésité à arraisonner un chalutier chinois dans ses eaux.
Mers de Chine. Dernière remarque avant de suivre Shinzo Abe dans son périple : à l’exception de l’Australie, les pays concernés ont tous eu maille à partir avec la Chine à propos de la souveraineté sur des îlots et zone économiques exclusives associées, à commencer par le Japon (Cf. Les Senkaku/Diaoyu, revendiquées depuis 1971 par le Japon la Chine et Taiwan), les Philippines (dans les Spratly, la Chine contrôle le récif de Scarborough depuis 2011), l’Indonésie (arrestation de prétendus pêcheurs chinois en juin 2016 près des îles Natuna) et le Vietnam (perte du contrôle des Paracels après la bataille de 1974).
Rappel. Shinzo Abe avait effectué en septembre 2014 un voyage officiel de trois jours en Asie du Sud, Bangladesh et Sri Lanka, où il avait renforcé les liens économiques et géostratégiques du Japon. Ces discussions s’étaient inscrites dans la politique dite du « diamant de sécurité » prônée par Shinzô Abe, qui devait permettre au Japon et à ses partenaires américains, australiens et indiens, de protéger la région maritime qui s’étend du littoral africain de l’océan Indien aux côtes américaines de l’océan Pacifique.
Chapitre I
Les sujets abordés lors quatre visites de Shinzo Abe
Philippines, 12 et 13 janvier 2017
Porté à la présidence des Philippines le 30 juin 2016, Rodrigo Duterte consacre sa première visite à l’étranger à la Chine, le 20 octobre suivant. Sa seconde visite avait été pour Tokyo (« Le Japon est un pays frère plus qu’un pays ami… »), quelques jours plus tard, le 26 octobre.
En retour, Abe, le 12 janvier 2017, est le premier chef de gouvernement à se rendre à Manille depuis l’élection du nouveau président.
La situation diplomatique des Philippines du président Duterte, une subtile alliance des contraires
Manille s’éloigne de Washington…
Parmi les critiques internationales dénonçant le traitement brutal du monde de la drogue (6 000 exécutions extra-judiciaires depuis juin 2016), celles des États-Unis ont piqué au vif le nouveau président et contribué à un changement d’alliance apparemment radical. Alors que le traité de défense mutuelle entre Manille et Washington avait été respecté depuis 1951, renforcé de surcroît par la lutte contre la rébellion islamiste du sud et la surveillance commune des incursions chinoises en mer de Chine du Sud, les différents engagements militaires, comme les traditionnels exercices conjoints (US-Philippine Amphibious Landing Exercise (PHIBLEX) ; Cooperation Afloat Readiness and Training Exercise (Carat) ont été mis en veilleuse tandis que les démonstrations de sympathie à l’égard de Pékin et de Moscou ont été bruyamment mis en scène. Les Philippines doivent consolider leur armée et ne veulent pas pour cela dépendre excessivement des États-Unis. Duterte s’est d’ailleurs prononcé pour le départ de son pays d’ici deux ans des troupes américaines qui y sont encore stationnées. Durant sa visite, Abe a cependant convaincu Duterte de conserver de bonnes relations avec Washington.
…et se rapproche de la Chine…
Duterte, élu au moment où le Tribunal international de La Haye donnait satisfaction au recours engagé par son prédécesseur à l’encontre des menées de Pékin en mer de Chine du Sud. Il a instauré aussitôt des liens avec la Chine, rivale historique des Philippines. En échange de cette attitude conciliante, Pékin consent à calmer le jeu en mer de Chine du Sud et octroie une aide de 24 milliards de dollars (prêts et investissements). Ce rapprochement n’empêche pas, en décembre 2016, le ministre philippin des Affaires étrangères du gouvernement Duterte de transmettre à l’ambassade de la RPC une « note verbale » désapprouvant l’armement récent d’îles artificielles édifiées en mer de Chine du Sud. Le 17 janvier 2017, à son tour, le général Delfin Lorenzana, ministre de la défense, qualifie cette situation – éloignée de la rhétorique officielle affichée par Pékin, « paix et amitié » – de « très inquiétante ». Malgré le réchauffement des relations avec la Chine, le gouvernement a le devoir de protéger ses intérêts de la nation. En regard des milliards de dollars du potentiel chinois en matière d’investissement et de commerce, les Philippines ont un difficile équilibre à tenir avec leurs exigences de souveraineté. La Chine n’en a cure, car elle est parvenue à placer les discussions dans le format bilatéral.
…et de la Russie…
Duterte avait fait savoir son admiration pour le président russe Vladimir Poutine, après ses entretiens avec lui en marge d’un sommet régional de l’APEC Economic Leaders Meeting au Pérou (Lima, 20 novembre 2016). Un memorandum of understanding russo-philippin pourrait comprendre des échanges entre militaires, des exercices conjoints, navals notamment, et des visites d’étudiants. Moscou a envoyé en visite de courtoisie de cinq jours à Manille un destroyer et un navire d’accompagnement début janvier 2017. Ce pays aux 7 100 îles dispose bien de 4 frégates et 11 corvettes ainsi que de patrouilleurs, mais reste dépourvu de destroyers et de sous-marins, ce qui offre une ouverture de marché aux chantiers russes. Alors qu’auparavant les deux pays n’avaient que peu de contacts, un partenariat dans ce registre pourrait se révéler fructueux pour la Russie, à la fois pour les ventes d’armement dans la région et pour son grand plan vers l’Asie-Pacifique. Duterte a prévu de se rendre à Moscou en avril 2017.
…mais accepte l’argent du Japon.
Duterte cherche à établir une politique étrangère asiatique, en renforçant ses liens avec le Japon autant qu’avec la Chine tout en réduisant la dépendance à l’égard des États-Unis. Comme la Chine, Abe a soutenu ouvertement la guerre de Duterte contre la drogue et, à l’instar d’un magnat chinois de l’immobilier, devrait participer aux centres de désintoxication du pays.
En assurant des flux réguliers d’aide et d’investissement, l’ambition de Tokyo est de contenir l’influence chinoise croissante dans la région géostratégique qu’est l’Asie du Sud-Est. Le Japon est ainsi devenu l’un des principaux partenaires commerciaux des Philippines et fournisseurs d’aide. Par l’intermédiaire de la Banque asiatique de développement, le Japon contribue largement à la réduction de la pauvreté aux Philippines, en lui prêtant 745 millions de dollars par an en moyenne depuis 2006. En 2015, le Japon a été la principale source d’investissement étranger direct aux Philippines (usines automobiles, projets agricoles dans les régions éloignées, installations touristique) avec un total de 18 milliards de dollars.
Lors de la visite de Duterte à Tokyo en octobre 2016, le Japon offre aux Philippines 19 milliard de dollars (1,8 d’aide au développement et 17,2 d’investissement du groupe Marubeni dans l’électricité, l’amélioration des autoroutes et les transports en commun). Le 12 janvier 2017 à Manille, les deux parties signent des accords renforçant la coopération dans les domaines de l’agriculture, des industries agroalimentaires, des infrastructures de transport et de la sécurité (équipement de lutte contre le terrorisme). Au cours des cinq prochaines années, 8,7 milliards de dollars d’aide publique et d’investissements privés y seront affectés. Mindanao, le fief de Duterte, devrait bénéficier d’un important projet ferroviaire.
Le Japon est également devenu une importante source d’assistance en matière de sécurité maritime aux Philippines. Duterte fait valoir que « Comme nations maritimes, les Philippines et le Japon ont un intérêt commun à garder nos eaux sûres et à l’abri de menaces de toute nature ». Une subvention de 5,2 millions de dollars sera consacrée aux vedettes philippines et aux équipements antiterroristes. Les garde-côtes philippins ont été destinataires de 10 navires de 44 mètres (1,46 milliard de dollars) dont la livraison a commencé en juillet 2016 et auxquels vont s’ajouter deux navires multi-rôle de 90 mètres, deux navires de patrouille avancés et des avions de surveillance.
NB. Le Vietnam et les Philippines sont liés par un accord de coopération navale depuis octobre 1988.
Australie, 14 janvier 2017
Les entretiens entre Shinzo Abe et le Premier ministre australien, Malcolm Turnbull, ont essentiellement porté sur la sécurité régionale – l’agressivité croissante de la Chine en mer de Chine du Sud – et les échanges commerciaux et évoqué et la perspective du changement d’équilibre des pouvoirs en Asie du fait de l’arrivée de D. Trump à la présidence des États-Unis.
Sécurité : coopération logistique
L’année 2017 marque le 10e anniversaire de la déclaration commune sur la coopération en matière de sécurité, conclue entre John Howard et Shinzo Abe lors de son bref premier mandat de Premier ministre (2006-2007). Abe a déclaré que la sécurité régionale était la priorité de son et qu’il voulait « parler à ses amis en vue de joindre les forces pour la paix régionale » et les aider à renforcer le développement de la surveillance maritime et accroître les moyens de lutte anti-sous-marine. Turnbull : « l’Australie compte le Japon parmi ses partenaires les plus proches en matière de sécurité et de défense, guidés par un engagement partagé dans la poursuite de la paix et la stabilité de la région… »
Les deux pays ont signé un pacte (Japan-Australia acquisition and cross-servicing agreement, ACSA) révisé pour hausser d’un cran la coopération logistique entre leurs forces de défense, SDF. Ainsi, les Forces de self-défense japonaises pourront fournir armes et munitions à l’armée australienne, ce qu’avait exclue la version initiale de 2013, limitée au partage de vivres, de carburant et autres fournitures notamment pendant les opérations de maintien de la paix des Nations unies. L’ACSA, qui a suscité la critique du public selon laquelle Abe cherche à éroder la Constitution pacifiste, permet au Japon d’aider les forces de défense étrangères qui répondent à des situations jugées « importantes pour la paix et la sécurité du Japon ». La chaîne des coopérations bilatérales se prolonge avec l’Indonésie. Un « Dialogue » entre ministères respectivement chargés des Affaires étrangères et de la défense coopération d’Australie et d’Indonésie, dit Dialogue 2+2, réuni les ministres concernés depuis 2012. Le 4e Dialogue s’est tenu le 27 octobre 2016 (http://foreignminister.gov.au/releases/Pages/2016/jb_mr_161027a.aspx).
Dans le même esprit, un accord devrait être signé avant la fin de 2017 pour des exercices et des opérations conjointes, accord qui va dans le sens de la politique du « pacifisme proactif » de Shinzo Abe, qui veut élargir le rôle des SDF.
La coopération trilatérale Japon-Australie-États-Unis et leurs alliances respectives, aujourd’hui avec les États-Unis de Trump « restent aussi pertinentes et importantes aujourd’hui qu’ils l’ont été depuis plus de six décennies ». Toutefois, l’ancien Premier ministre australien Paul Keating a déclaré que Rex Tillerson, le nouveau secrétaire d’Etat américain menaçait d’impliquer l’Australie dans une guerre avec la Chine, qualifiant ses propos de « simplement ridicules ». Quelques jours avant, le 12 janvier, dans son audition au Sénat, Tillerson avait en effet déclaré que si les États-Unis il était favorable au blocage de l’accès de la Chine aux îles artificielles construites en mer de Chine méridionale (We are going to have to send China a clear signal that, first, the island-building stops; and second, your access to those islands is also not going to be allowed) et que les alliés des États-Unis devraient leur fournir assistance. Dans son audition devant le Sénat, son collègue James Mattis, le nouveau secrétaire à la défense avait, sur le même sujet, tenu des propos nettement plus nuancés et retenus : « The United States must try to engage and collaborate with China where possible, but also be prepared to confront inappropriate behavior if China chooses to act contrary to our interests ». J. Mattis se rendra au Japon et en Corée du Sud du 2 au 4 février 2017. Il est inhabituel qu’un secrétaire de la défense américain tienne une réunion avec un ministre de la défense ou d’autres personnalités gouvernementales à l’étranger si peu de temps après avoir assumé ce poste. Ce premier voyage vise apparemment à souligner son alliance avec le Japon et la Corée du Sud.
Commerce : le TPP
Malgré le désengagement annoncé des États-Unis (effectif depuis le 23 janvier 2017) et la politique protectionniste proclamée par Donald Trump, MM. Abe et Turnbull ont réaffirmé leur engagement en faveur de l’entrée en vigueur de l’accord commercial du Partenariat transpacifique dont leurs deux pays sont signataires.
La visite a été utilisée par M. Abe pour promouvoir l’importance du libre-échange : « Au lieu de reculer, nous allons continuer à briser les obstacles persistants à l’entrée sur de nouveaux marchés et à établir de nouvelles règles facilitant le commerce pour le 21e siècle. C’est pourquoi l’Australie et le Japon sont déterminés à ratifier le Partenariat transpacifique ». « Il est plus que jamais nécessaire que le Japon et l’Australie, en tant que partenaires stratégiques spéciaux, jouent un rôle de premier plan pour la paix et la prospérité régionales, car nous partageons des valeurs communes comme la liberté, l’état de droit et la démocratie », a déclaré M. Abe.
- Turnbull répond en affirmant qu’aujourd’hui, face à la montée du protectionnisme, son engagement à ouvrir des marchés est plus important que jamais. « Il est impératif de résister à ces voix qui nous pressent de nous fermer au monde, parce que le protectionnisme est un chemin vers la pauvreté ». « Nous avons confirmé notre engagement à l’égard de la primauté du droit, du libre-échange, des marchés ouverts dans notre région – les fondements sur lesquels reposent notre prospérité et celle de milliards d’autres dans notre région ».
Steven Ciobo, son ministre du commerce, salue le leadership de Shinzo Abe sur le PPT et les avantages de celui-ci. « L’Australie est fortement convaincue que le PPT offre des avantages considérables aux pays qui y adhèrent. Nous espérons fermement voir sa ratification du PPT par les pays concernés ».
Complément d’information: le Livre blanc australien 2016 sur la défense
http://www.defence.gov.au/whitepaper/Docs/2016-Defence-White-Paper.pdf
L’Australie a démontré sa capacité en matière de « hard power » entre 2006 et 2008, lors de la crise humanitaire au Timor oriental, victime d’une invasion de l’Indonésie. L’Australie avait joué un rôle majeur en conduisant la Force internationale pour le Timor oriental (Opération Astute).
- L’Australian Defence Force est une formation militaire d’élite aux technologies de pointe, qui agit principalement comme soutien de l’armée américaine.
Le Livre blanc australien 2016 sur la défense, « le plus rigoureux et complet dans toute l’histoire de l’Australie », présente le plus ambitieux plan de régénération de la Royal Australian Navy depuis la seconde guerre mondiale. Sa vision stratégique vise l’horizon 2035 et s’applique en priorité à la région Indo-Pacifique (appellation utilisée officiellement par le Livre blanc précédent, 2013). Il prévoit que d’ici à 2035, la moitié des sous-marins et des avions de combat avancés existant au monde, appuyés sur des réseaux sophistiqués de renseignement, seront opérationnels dans les pays de la région Indo-Pacifique.
Objectifs :
- Assurer la défense du territoire national, de ses frontières et de sa ZEE
- Identifier les défis sécuritaires auxquels le pays devra probablement faire face.
- Œuvrer au renforcement de l’architecture de sécurité régionale en Asie du Sud-Est (particulièrement l’Indonésie), du Pacifique Sud et des capacités de défense de la Papouasie-Nouvelle Guinée, de Timor-Leste et des îles du Pacifique. L’accent est porté
- sur la montée en puissance de l’industrie de défense, notamment celle des arsenaux (sous-marins), l’objectif étant de surclasser les capacités militaires régionales,
- l’engagement international – interopérabilité avec les alliés, américains et néo-zélandais en particulier,
Les facteurs dominant la vision stratégique :
- le rôle des États-Unis (pièce centrale de la politique de défense de l’Australie, en regard notamment du maintien de la stabilité dans la région Indo-Pacifique) et de la Chine (dont la croissance économique offre des opportunités à l’Australie et autres pays de la région Indo-Pacifique. Les relations sino-australiennes ont été portées au niveau d’un Partenariat stratégique élargi lors de la visite du président Xi Jinping en 2014), et leurs relations,
- Daesh,
- l’instabilité du voisinage (mer de Chine du Sud et Corée du Nord),
- la modernisation de l’armement dans la région ,
- le risque de cyber-attaque,
- les conséquences du changement climatique (migrations venues des îles menacées).
Un point de vue très éclairant sur l’ambiguïté de la position de l’Australie au regard de son environnement asiatique est fourni par l’article de Fabrice Argounes, « Les noces de l’Australie et de l’Asie auront-elles lieu ? », La Vie des idées, 19 octobre 2010. ISSN : 2105-3030.
Indonésie, 15 et 16 janvier 2017
Le président indonésien Joko Widodo et Shinzo Abe se sont rencontrés six fois au cours des deux années écoulées.
Aide au développement et investissement
Quatre projets stratégiques impliquant l’aide du Japon sont été discutés lors de la visite du Premier ministre japonais Shinzo Abe en Indonésie :
- Patimban Port. Le projet d’un grand port maritime situé à l’ouest de Java est d’importance nationale. Il se trouvera à environ 70 km du domaine industriel de Karawang à Bekasi, où sont installées de nombreuses entreprises industrielles japonaises, en particulier les constructeurs automobiles. Il aura une capacité de manutention de 1,5 million d’unités équivalentes de 20 pieds (TEU) une fois qu’il aura été achevé en 2019, puis de 7,5 millions d’EVP d’ici 2027 – soit environ la moitié de la capacité du port de Jakarta, Tanjung Priok. L’investissement dans le port est estimé à 3 milliards de dollars, avec environ 1,7 milliard de dollars devant être couverts par les prêts japonais par le biais de l’Agence japonaise de coopération internationale (JICA). Cependant, un plan d’ingénierie détaillé (DED) ainsi que d’autres questions administratives doivent d’abord être complétés avant la signature, notamment le plan d’aménagement du territoire provincial et l’étude d’impact environnemental. L’opérateur portuaire public Pelindo II – associé à une entreprise japonaise à désigner (candidats : Mitsubishi et Astra) – serait désigné comme l’opérateur de Patimban Port. Le contrat de prêt avec la JICA et le partenariat entre Pelindo II et la société japonaise retenue devaient être réglés lors de la visite d’Abe.
- La ligne à moyenne vitesse Jakarta-Surabaya. Le projet consiste à transformer la voie de chemin de fer existante en une ligne ferroviaire à moyenne vitesse (160 km/h). Le coût est estimé à 2,6 milliards de dollars. Ce projet d’environ 600 km vise à réduire de plus de moitié la durée du trajet entre la capitale et la ville principale de Java Est, soit environ cinq heures. Il coûtera probablement moins cher que la ligne de Jakarta-Bandung (5,5 milliards de dollars), car la vitesse des trains sera moindre et la majeure partie du foncier nécessaire est déjà acquise par l’État. Le Japon a été historiquement l’un des plus gros investisseurs de l’Indonésie, mais leurs relations s’étaient dégradées en 2015 lorsque le gouvernement avait écarté Tokyo au profit de Pékin pour développer son premier réseau de train à grande vitesse reliant Jakarta à Bandung à Java Ouest. La Chine veut étendre son influence dans la région dans le cadre de sa politique « One Belt, One Road » et ambitionne d’être un fournisseur mondial de trains. Le Japon ne se tient pas pour définitivement supplanté.
- Le bloc gazier East Natuna (situé en mer de Chine du Sud, à 1 100 km au nord de Jakarta, entre la Malaisie et ses provinces insulaires de Sabah et Sarawak). Ce bloc prometteur (le plus important du sud-est asiatique, 40 % des réserves indonésiennes de gaz) découvert en 1970, contient de quoi produire 56,6 millions de mètres cubes par jour pendant 30 ans et des réserves de pétrole estimées à 46 millions de barils de stockage qui pourraient produire 7 000 à 15 000 barils par jour. L’entreprise nippone Inpex devrait être associée à l’opération (à 35 %). Celle-ci est toutefois grevée par plusieurs obstacles, ce qui explique que nombre de compagnies gazières et pétrolières s’y sont intéressées mais sans suite effective. Le gisement est situé dans le secteur méridional de la mer de Chine du Sud que se disputent l’Indonésie et la Chine. Et si les îles Natuna ne sont plus revendiquées par cette dernière depuis 1994, leur zone économique exclusive l’est. Par ailleurs, avec un coût de mise en exploitation de 24 milliards de dollars (18 plateformes et 200 puits), la rentabilité de son exploitation ne serait assurée qu’avec un prix du baril au moins égal à 100 dollars. Enfin, le gaz contient 70 % de gaz carbonique. Surmonter l’ensemble de ces difficultés explique que l’exploitation commerciale n’est pas envisagée avant 2030, le gaz est destiné en partie à l’exportation vers le Japon. Au mois de mars 2016, le gouvernement indonésien avait demandé une exploitation onshore du bloc gazier de Masela en mer d’Arafura (province des Moluques) alors que l’accord initial prévoyait une exploitation offshore. Inpex et Shelly devaient investir 1,6 milliard de dollars. Cette remise en cause provoquée par un conflit interministériel – entre le ministère de la coordination des affaires maritimes, tenant de l’onshore et celui des mines et de l’énergie – avait provoqué des frictions dans les relations bilatérales.
- Le projet de raffinerie de pétrole aux Moluques
La demande de produits raffinés est de 1,5 million à 1,6 million de b/j. la société nationale des hydrocarbures Pertamina possède et exploite sept raffineries de pétrole d’une capacité installée totale de 1,05 million de b/j. Pour combler le déficit et réduire les importations, un décret du 10 novembre 2016 autorise les sociétés privées à importer du brut ou du condensat pour répondre à leurs besoins de raffinage, distribuer du carburant subventionné par le gouvernement et exporter des produits raffinés si les besoins intérieurs ont été satisfaits. Le but est d’accélérer la construction de nouveaux projets et de réduire la dépendance de l’Indonésie à l’égard des importations de carburant. Le gouvernement prévoit le lancement d’un appel d’offres pour la construction de huit raffineries situées au plus près des blocs d’exploitation pétrolière pour économiser les coûts de transport. Ce seront des raffineries de taille moyenne (capacité de raffinage de 3 000 à 20 000 barils/jour selon le gisement desservi). La première sera celle des Moluques. Trois à cinq investisseurs ont déjà exprimé leur intérêt à y participer. L’Indonésie prévoit également de construire quatre raffineries entre 2020 et 2025 avec des capacités de 300 000 à 350 000 b/j.
- Les projets pétrochimiques et d’engrais, pour mémoire
Plusieurs autres sujets ont été abordés :
- Centres de pêche
Dans le cadre d’un plan de développement de centres de pêche intégrés dans les îles périphériques de l’Indonésie, la visite du Premier ministre japonais et de la trentaine de chefs d’entreprise japonais de sa délégation ouvre la voie à de nouvelles modalités de coopération dans le secteur de la pêche ; celle-ci devrait viser la construction de nouveaux ports de mer pour des navires de pêche dans des zones comme Sabang (Aceh), Morotai (Moluques) et Muara Baru (nord de Jakarta). Le Japon peut aider la création d’installations de stockage à froid de haute technologie dont le secteur indonésien de la pêche besoin. L’Indonésie est le fournisseur de poisson du Japon.
- Sécurité maritime
L’Indonésie et le Japon, deux pays insulaires, sont convenus de coopérer afin d’intensifier la sécurité maritime et le développement des îles isolées en Indonésie.
- Commerce
En 2016, le commerce bilatéral entre l’Indonésie et le Japon a atteint 31 milliards de dollars et l’investissement direct japonais en Indonésie, 4,5 milliards de dollars pour les seuls neuf premiers mois de 2016, soit presque le double de ce qu’ils avaient été pour les douze mois de 2015 (2,87 milliards de dollars). Thomas Lembong, le président du Conseil de coordination des investissements (BKPM), espère que les mesures de politique économique introduites par le président Jokowi permettront d’attirer de nouveaux investisseurs japonais.
Vietnam, 17 janvier 2017
2017 est l’Année de l’Amitié Japon-Vietnam et le 40e anniversaire de l’amitié et de la coopération entre l’ASEAN et le Japon.
Sécurité maritime en mer de Chine du Sud
Les Philippines du président Rodrigo Duterte venant de se rapprocher de Pékin, le Vietnam reste parmi les quelques pays de la région à être prêt à résister à la Chine. Le Premier ministre japonais Shinzo Abe a annoncé le 16 janvier 2017 que le Japon fournira six navires de patrouille au Vietnam dans le cadre d’un prêt de 1 milliard de dollars destiné à renforcer ses efforts de sécurité maritime.
Les propos de Rex Tillerson, le nouveau secrétaire d’État américain, selon lequel la Chine doit cesser de construire des îles en mer de Chine méridionale et que l’accès à ces îles ne doit plus être autorisé ont eu un écho inquiétant à Hanoi. La Chine et le Vietnam ont déclaré qu’ils avaient accepté de gérer leurs différends maritimes et de préserver la paix et la stabilité.
Commerce et investissements
Le Japon est le deuxième plus important investisseur étranger du Vietnam après la Corée du Sud. Les liens entre Tokyo et Hanoi se sont réchauffés ces dernières années et le Japon, troisième économie du monde – mais dont la croissance intérieure dépend désormais d’une population vieillissante et en diminution – a investi massivement au Vietnam.
À Hanoi, Shinzo Abe a souligné l’importance du TPP et d’autres accords de libre-échange et rappelé que le Vietnam comme son pays ont été de fermes soutiens de ce partenariat. Différents accords commerciaux ont été signés par des chefs d’entreprise japonais qui l’accompagnaient, notamment dans les domaines de l’énergétiques, du textile, mais aussi dans celui des hautes technologies ainsi qu’un projet visant à réduire l’impact du changement climatique.
Les entreprises japonaises sont actuellement impliquées dans plus de 3 000 projets d’une valeur d’environ 42 milliards de dollars, principalement dans le secteur manufacturier.
Plaque tournante en Asie du sud-est de la fabrication d’articles d’exportation (habillement, agriculture, électronique, automobile), le Vietnam séduit les investissements japonais de haute technologie et souhaite que Tokyo devienne son principal investisseur.
Les géants électroniques comme Panasonic, Samsung, Foxconn et Intel ont tous fait d’importants investissements, fondés sur la main-d’œuvre vietnamienne, jeune, relativement peu coûteuse mais de mieux en mieux éduquée. Shinzo Abe a appelé le Vietnam à « continuer à soutenir les entreprises japonaises et à profiter de leur expérience dans les domaines de la haute technologie ». À cet égard, le Vietnam est devenu un concurrent sérieux pour ses voisins comme la Thaïlande, la Malaisie, la Chine et Taiwan.
Mitsubishi investit dans une centrale thermique dans la province de Ha Tinh, au Vietnam. Le Japon est par ailleurs à la recherche de nouveaux marchés dans le domaine de la construction et se prépare à accorder au Vietnam des prêts – jusqu’à environ 500 millions de dollars – pour l’exécution de « projets d’infrastructure de haute qualité », tels que projets ferroviaires à grande vitesse et infrastructures aéroportuaires.
Chapitre II
Les relations entre pays concernés
Les relations du Japon et de l’Australie avec l’ASEAN
Le Japon comme l’Australie*, qui ont déjà coopérations bilatérales militaires avec l’ensemble des pays de l’ASEAN, ont récemment raffermi leurs accords stratégiques avec l’institution elle-même. Le but de Tokyo et de Canberra est de prévenir diplomatiquement la menace posée par la Chine qui accroît son activité dans les océans Indien et Pacifique, tout en accroissant leur crédibilité militaire, même limitée (cf. la commande de sous-marins par l’Australie).
*Les fondations de leur partenariat sécuritaire sont établies sur la Japan-Australia Joint Declaration on Security Cooperation de mars 2007, qui vise notamment la sécurité maritime et aérienne, dont les signataires sont les Premiers ministres John Howard et… Shinzo Abe.
- Australie-ASEAN
Le Partenariat stratégique ASEAN-Australie (2015-2019) constitue « le pivot pour un règlement par les deux parties des défis régionaux comme la sécurité de navigation maritime, le terrorisme, la criminalité transnationale et la traite humaine ». Le premier sommet ASEAN-Australie a eu lieu le 7 septembre 2016, à Vientiane. Le Premier ministre australien Malcolm Turnbull a invité les dirigeants des pays membres de l’ASEAN à participer au Sommet spécial ASEAN-Australie qui aura lieu à Canberra en 2018.
Voir : « Plan of Action to Implement the ASEAN-Australia Strategic Partnership » http://asean.org/wp-content/uploads/images/2015/November/ASEAN-Australia/ASEAN-Australia%20Strategic%20Partnership%20POA%202015-2019-Final.pdf
- Japon-ASEAN, la « Vision de Vientiane »
Le Japon participe, depuis leur création en 2010, aux sommets élargis ASEAN Defence Ministers Meeting Plus (ADMM +). Le premier document officiel dressant un tableau complet et transparent de la coopération japonaise en matière de défense avec l’ensemble de l’ASEAN, appelé « La vision de Vientiane » a été rendu public lors de la deuxième réunion informelle des ministres de la défense de l’ASEAN et du Japon tenue également à Vientiane le 16 novembre 2016.
Selon le ministère japonais de la défense, c’est « le premier document officiel à donner une image complète et transparente de la coopération japonaise dans le domaine de la défense avec l’ensemble de l’ASEAN ». Un changement notable est intervenu en avril 2014 avec la levée de l’interdiction des exportations d’armes, ouvrant la voie à l’équipement de défense et à la coopération et aux transferts technologiques, notamment dans le cadre de la coopération avec des organisations ou des pays alliés. Peu après, la réunion informelle inaugurale des ministres de la défense de l’ASEAN et du Japon en décembre 2014 était organisée en marge du Forum vice-ministériel de défense Japon-ASEAN. La « Vision » a pour but de « promouvoir la coopération pratique de défense » en tirant parti des différentes coopérations existantes. Elle se concentrerait notamment sur la promotion de l’état de droit et le renforcement de la sécurité maritime. Appuyée sur des moyens spécifiques de coopération, Mme Tomomi Inada, ministre japonaise de la défense, présente à Vientiane, a précisé que la coopération mettrait en œuvre un éventail complet de moyens : des séminaires sur le droit international aux équipements de défense et à la coopération technologique en passant par l’aide au renforcement des capacités militaires, la formation (notamment : droit maritime et cyber-sécurité) et les exercices conjoints, le développement des ressources humaines et les échanges universitaires.
L’approche globale offerte par la Vision de Vientiane à l’ASEAN dans son ensemble, par opposition à une approche étroite qui traiterait seulement de la sécurité maritime, permet d’éviter le soupçon d’une initiative visant la Chine ou la mer de Chine du Sud. Par ailleurs, madame Inada, prônant le bottom-up et en mettant l’accent sur l’écoute des besoins des pays concernés au lieu d’apparaître comme porteur d’une vision « japonaise » des situations, a paru convaincre les pays. Il sera intéressant de suivre l’évolution de ce processus coopératif. Nul doute que Pékin y sera très attentif.
Le Premier Ministre Junichiro Koizumi avait joué un rôle déclencheur en janvier 2002 en proposant le projet de Communauté d’Asie-Orientale (East Asian Community) incluant l’Australie et la Nouvelle-Zélande, puis l’Inde. Il plaçait ainsi l’ASEAN au centre d’une communauté régionale.
Pour des détails sur les relations militaires bilatérales du Japon dans la région (Laos, Philippines, Vietnam…), consulter notamment : Le Japon dans son environnement géostratégique, par E. Pflimlin & L-A Borer, in Diploweb, 6 avril 2015 http://www.diploweb.com/Le-Japon-dans-son-environnement.html#nh14
Chapitre III
Le couple Australie-Japon et l’Inde
Australie-Inde-Japon
L’Inde et le Japon développent, depuis l’an 2000, un partenariat stratégique global [11]. En effet, les deux pays partagent des valeurs fondamentales et ont des intérêts communs pour la paix, la sécurité et la prospérité en Asie et dans le Monde. Pour le Japon, dont l’économie est étroitement dépendante du trafic maritime, l’Inde occupe une place particulièrement stratégique car ce sous-continent est situé au centre des lignes de communication reliant l’Archipel nippon au Moyen-Orient et à l’Afrique.
L’Inde et l’Australie
L’Inde et l’Australie s’engagent à renforcer leurs relations économiques bilatérales, y compris la conclusion d’un accord de libre-échange d’ici la fin de 201, ce qui en regard du délai, et au vu des difficultés à résoudre au préalable, est apparu à certains comme trop ambitieux.
Australie-Inde-Japon
Les trois pays ont des intérêts communs dans les domaines de la défense et des affaires étrangères et ont jugé utile de renforcer leurs relations ministérielles dans ces domaines. La première réunion du Dialogue trilatéral Australie-Inde-Japon a eu lieu à Delhi, le juin 2015, au niveau des ministres des Affaires étrangères. Étant donné leurs situations stratégiques maritimes à travers l’Asie-Pacifique, la coopération entre l’Australie, le Japon et l’Inde devrait se concentrer sur les exercices en mer entre les trois marines.
La sécurité maritime était à l’ordre du jour de cette première réunion, y compris la liberté de navigation dans la mer de Chine méridionale et la coopération maritime trilatérale dans l’océan Indien et dans l’océan Pacifique.
Les responsables des forces navales indiennes ont indiqué que des discussions préliminaires en vue d’un exercice conjoint entre les trois pays se sont tenues. Des officiers navals indiens ont par ailleurs des pourparlers à Perth avec leurs homologues australiens pour leurs tout premiers exercices maritimes bilatéraux prévus pour septembre 2015 au large de la côte orientale de l’Inde. New Delhi envisage également d’inclure à nouveau le Japon dans les exercices indo-américains Malabar en octobre 2015. Ceci s’ajoute à l’exercice maritime de l’Inde du Japon (JIMEX) tenu annuellement entre les deux pays.
Il a été précisé que la réunion trilatérale ne devrait pas être considérée comme un « front anti-chinois ».
Un accord trilatéral entre l’Australie, le Japon et l’Inde pourrait être développé à travers deux mécanismes primaires : les dialogues et les exercices. Des réunions trilatérales de hauts fonctionnaires sont maintenant en cours, ainsi que des discussions informelles entre représentants des groupes de réflexion, des universités et des institutions de la politique étrangère et de la défense de chaque pays.
Parallèlement à ces dialogues, l’un des trois ministres de la défense pourrait convoquer une réunion ad hoc avec ses deux homologues pour discuter des questions d’intérêt mutuel, comme l’interopérabilité, et identifier les possibilités de collaboration, par exemple en matière de partage du renseignement.
Un rappel : Japon-USA-Australie-Inde : une stratégie de sécurité « en diamant » (Extrait d’un article de Suzuki Yoshikatsu, du 29 janvier 2016, in Nippon.com)
Le « diamant stratégique » de Shinzo Abe (15 janvier 2013)
L’intérêt du Japon pour l’Indo-Pacifique s’est affirmé depuis le retour de M. Abe au pouvoir, le 26 décembre 2012, mais il l’avait évoqué sous une autre forme cinq ans plus tôt. Dans le cadre d’une visite en Inde pendant son premier mandat, M. Abe avait prononcé le 22 août 2007 un discours au Parlement indien. L’approche développée est un élément essentiel de la politique étrangère menée actuellement. Dans son discours qui avait pour thème Le Mélange des deux océans, le titre d’un ouvrage de Dârâ Shikôh, un prince de l’empire moghol, le Premier ministre japonais s’adressait à l’ensemble du peuple indien. Il y développait l’idée d’une « Asie élargie » par le lien entre les océans Pacifique et Indien et y exprimait sa détermination à créer ensemble une mer ouverte et transparente grâce à un partenariat stratégique global entre les deux pays. Ce discours avait été alors bien accueilli par la partie indienne et ému ceux qui l’avaient entendu.
Une position de défense japonaise plus normalisée – appuyée sur une armée capable de coopérer en toute confiance avec des partenaires au-delà du voisinage immédiat du Japon – pourrait contribuer au maintien de la sécurité et de l’ordre dans les zones communes de la région indo-pacifique, où le Japon, nation commerçante, a un intérêt légitime.
Un dialogue stratégique trilatéral existe déjà : l’Australie, les États-Unis et le Japon, ainsi qu’un forum trilatéral émergent entre le Japon, les États-Unis et l’Inde. Une trilatérale entre l’Australie, l’Inde et les États-Unis a également été brièvement évoquée. Entre-temps, des dialogues bilatéraux, des déclarations de sécurité et des accords de coopération dans le domaine de la défense (quoique sans traités d’alliance) ont proliféré entre américains et partenaires alliés, notamment Australie-Japon, Japon-Inde, Australie-Inde et Australie-Corée du Sud.
Le dialogue quadrilatéral de 2007 a réuni le Japon, l’Inde, l’Australie et les États-Unis, les quatre premiers intervenants en Asie du Sud-Est après le tsunami de 2004.
Chapitre IV
L’Indo-Pacifique en fond de tableau
Le nouveau concept géostratégique « indo-pacifique »
Nous connaissions l’Asie de l’Est, celle du Sud, l’Asie centrale, l’Asie du Sud-Est, le Pacifique, à la façon dont l’Amérique avait été découpée en ses deux moitiés, Nord et Sud. Et voilà que l’on commence à parler de l’Asie Indo-Pacifique, voire de l’Indo-Pacifique. Pourquoi ?
Selon l’Encyclopédie Universelle, l’Indo-Pacifique est la vaste région marine formée par l’océan Pacifique, l’océan Indien, la mer Rouge et le golfe Persique. Le terme n’a guère été utilisé qu’en biogéographie marine et en ethnographie. Il a fait irruption il y a peu dans le vocabulaire anglo-saxon de la géostratégie, pour désigner une construction régionale en émergence, avec la parution de quelques rares articles et ouvrages publiés en Australie et en Inde entre 2012 et 2016 (énumération en annexe).
La dénomination de la nouvelle région positionne son axe sur la ligne de découpage du monde qui a prévalu jusqu’à maintenant qui sépare le Pacifique occidental de l’océan Indien. Elle réunit deux systèmes stratégiques traités le plus souvent indépendamment. Ce « réassemblage » à nouveaux frais a attiré deux séries de critiques. D’une part l’espace géographique concerné serait trop étendu pour rester cohérent et, de l’autre, les points chauds (Corée du Nord, Inde-Pakistan, mer de Chine du Sud), concernant principalement des espaces sub-régionaux, n’auraient nul besoin de se référer à un niveau géographique supérieur.
Mais le concept n’est ni une simple novation terminologique ni une abstraction gratuite forgée par quelques intellectuels en mal d’originalité. Il tente simplement de définir la réalité nouvelle née d’un ensemble de mouvements intervenus depuis quelques décennies et que le renforcement de tendances latentes a rendu perceptible. Considérons ainsi, dans le désordre, les Look East Policies de la Malaisie et de l’Inde (pour celle-ci devenue Act East Policy avec le volontarisme de N. Modi), l’intensification de la navigation entre le Moyen-Orient et l’Asie orientale, le bourgeonnement d’organisations nées de l’ASEAN (ARF, ASEAN+Chine, Inde, Corée, Japon – la Vientiane Vision (Japon-ASEAN) ou le Dialogue Vietnam-Japon sur la politique de défense), le Sommet de l’Asie orientale, l’établissement par étapes du « collier de perles » chinois, les nouvelles routes maritimes de la soie du XXIe siècle, le pivot américain et ses points d’appui (Guam, Diego Garcia, Darwin, Okinawa, les bases de Pyeongtaek en Corée du Sud, sans compter Subic Bazy et Clark aux Philippines, à l’avenir incertain), etc.
Le concept répond à l’intensité croissante des flux de marchandises et d’hydrocarbures à travers les océans, à l’émergence de l’Inde, au développement des classes moyennes dans l’ensemble des pays de son périmètre, à l’exacerbation de problèmes communs comme la piraterie ou la fragilité environnementale. Le dévoilement des ambitions maritimes chinoises face aux positions indiennes et américaines a suscité la construction d’un cadre stratégique suffisamment pertinent pour qu’il soit adopté par le Livre blanc australien de la défense de 2016 établi à l’horizon 2035. Tous ces faits s’attachent à dessiner une vitalité propre à l’Indo-Pacifique. Cette vitalité procède de la physionomie singulière de la partie du monde où elle en train de prendre son sens et dont les traits ne se retrouvent nulle part ailleurs à cette échelle. Si l’océan Atlantique est nettement contenu entre deux masses continentales compactes, en revanche les océans Indien et Pacifique communiquent entre eux par de nombreux couloirs de navigation, ce qui donne à la région Indo-Pacifique le caractère d’un gigantesque « filtre » de nature insulaire.
Le concept, naissant et encore balbutiant, rassemble ces nouvelles réalités, tente d’en théoriser le potentiel pour en discerner les prolongements et les interactions en puissance. Il est symptomatique que ceux qui en sont à l’origine viennent de deux pays, l’Australie et l’Inde de second rang par rapport à la Chine et aux États-Unis. Ils se situent aux deux extrémités de cet ensemble, « oblique » par rapport à l’équateur, qui englobent les côtes orientales de l’Afrique, l’Asie du Sud-Est, les deux Corée, le Japon et la Chine maritime.
Ce concept tout neuf est potentiellement chargé de nouvelles visions du monde, ne serait-ce que pour les nations directement concernées. La plupart d’entre elles devraient apprécier d’être ainsi mises en lumière, sauf peut-être, la Chine. On peut en effet émettre deux hypothèses à son sujet. L’une postulerait que cette vision, qui relativise sa place en Asie, ne devrait pas lui plaire. Le concept d’Asie orientale, où sa masse terrestre – et sa démographie autant que son ambition – lui confère au contraire une prééminence éclatante lui convient mieux. Elle y est en position dominante, quasiment « chez elle ». Les limites familières de « son » Asie millénaire lui permettent de maîtriser les ressorts de son inimitié avec le Japon, de son rôle – ingrat – de chaperon avec la Corée du Nord et de sa garde aux frontières avec l’Inde. Le concept de région Indo-Pacifique amoindrirait ce confort psychostratégique. La seconde hypothèse, par contre, ferait de la région Indo-Pacifique l’espace dans lequel la Chine aspire à étendre son influence par degrés successifs, en remplissant progressivement les interstices entre les jalons déjà posés – sur la côte orientale de l’Afrique, au Pakistan ou aux Maldives, voire en Australie (Darwin). Les routes maritimes de la soie du XXIe siècle en serait l’instrument, à la manière des projets de routes terrestres lancés vers l’Asie centrale.
L’avenir dira si ce concept peut porter des fruits dans le domaine de la géostratégie. Mais, conduisant à porter une attention plus systématique à cette région, va-t-on la percevoir comme un ensemble. L’immensité de la région et l’ambiguïté tenant à son caractère insulaire et maritime, ont, à la différence avec les espaces terrestres, retardé la nette perception des phénomènes et l’analyse de leurs structures.
Chronologie des premières parutions sur le concept d’Indo-Pacifique
(à compléter)
À l’exception notable de l’article du général Daniel Schaeffer, membre du groupe Asie21, paru dans la revue Défense de l’IHEDN en avril 2009 Le théâtre maritime indo-pacifique dans la stratégie navale globale de la Chine (https://www.asie21.com/asie/images/pdf/strategie_navale_chinoise.pdf) et sauf omission, les premiers textes consacrés au nouveau concept de région Indo-Pacifique, livrés par des auteurs anglo-saxons, sont parus à partir de 2011-2012 : Tipping Point in the Indo-Pacific, un article de Michaël Auslin, est paru le 1er mars 2011 dans The American Interest et le suivant, Samudra Manthan : Sino-Indian Rivalry in the Indo-Pacific, de C. Raja Mohan, le 24 octobre 2012, dans une publication du Carnegie Endowment for International Peace, Washington. Le 21 novembre 2012, le professeur Rory Medcalf* prononçait à l’Australian National University, Canberra, la conférence magistrale de lancement de la nouvelle série « Centre de gravité » sous le titre : Pivoting the Map : Australia’s Indo-Pacific System, suivi par un article paru dans le quotidien australien The Diplomat le 12 décembre 2012, sous la plume de Rory Medcalf (biographie sommaire ci-dessous) sous le titre A Term Whose Time Has Come : The Indo-Pacific. Un deuxième article du même R. Medcalf, The Indo-Pacific : What’s in a Name ? approfondissant le concept est paru le 10 octobre 2013 dans The American Interest (volume 9, numéro 2), le 16 décembre 2013, Shiraishi Takashi décrit la Diplomatie chinoise des sommets et géopolitique de la région Indo-Pacifique (nippon.com). Puis viennent les Indiens : en 2014, deux ouvrages collectifs publiés, l’un, Indo-Pacific Region : Political and Strategic Prospects, sous la direction de Rajiv K. Bhatia et Vijay Sakhuja, et l’autre, Geopolitics of the Indo-Pacific, sous celle de Pradeep Kaushiva et Abhijit Singh. Ces deux ouvrages font à leur tour l’objet d’une recension dans le Journal of Defence Studies de janvier-mars 2016, une publication de l’Institute for Defence Studies and Analyses (IDSA), New Delhi, sous le titre Geostrategic Imperative of the Indo-Pacific Region, Emerging Trends and Regional Responses, par Saroj Bisftoyi, chercheur au North American Centre de l’IDSA.
* Le professeur Rory Medcalf, directeur du National Security College de l’Australian National University, directeur associé de l’Australia India Institute et associé principal visitant de la Brookings Institution, est un collaborateur du Lowy Institute for International Policy, think tank australien consacré à la politique étrangère, de défense, aide au développement, etc. Il a été appelé par le gouvernement australien au nombre des experts chargés de rédiger le Livre blanc de la défense publié en 2016. R. Medcalf s’est attaché à la théorisation du concept « Indo-Pacifique ».
Le 21 septembre 2015, le député Steven Ciobo était nommé au nouveau poste de ministre du Développement international et du Pacifique, chargé des relations de l’Australie avec les pays insulaires du Pacifique et du renforcement de la croissance économique et la réduction de la pauvreté dans cette « région ». Steven Ciobo est aujourd’hui ministre du commerce, du tourisme et de l’investissement.
Un exemple de réflexion stratégique régionale sur l’Indo-Pacifique initiée au Sri Lanka
Les « Galle* Dialogue »
À l’initiative du ministère sri-lankais de la défense et sous son égide, le Galle Dialogue se consacre à l’organisation d’échanges échanges susceptibles de déboucher sur des coopérations dans le domaine de la sécurité maritime (piraterie, terrorisme, trafics d’êtres humains, d’armes et de stupéfiants) et de la mise en jeu de la stabilité régionale. Les pays représentés sont ceux de la région maritime de « l’Indo-Pacifique » (appellation utilisée officiellement pour la première fois par le Livre blanc australien 2013 sur la défense : « un nouvel arc stratégique Indo-Pacifique commence à émerger comme un système, reliant les océans Indien et Pacifique via l’Asie du Sud-Est qui en est le centre »). Ci-après, un échantillon des préoccupations de ce Dialogue fourni par le programme du 7e d’entre eux.
* prononcer Golle.
7e Galle Dialogue 2016
Colombo, 28 & 29 novembre
Conférences et conférenciers
US Policy and Objectives in Building Strategic Partnership with Navies in the Indo-Asia-Pacific
by Admiral Harry B. Harris, US Navy, Commander US Pacific Command
India’s Perspective on the Benefits of Strategic Maritime Partnerships
by Admiral Sunil Lanba, Chief of the Naval Staff, Indian Navy
Challenges and Opportunities for Developing Strategic Maritime Partnerships
by Rear Admiral Wang Dazhong, Assistant to Chief of Staff of PLA Navy, China
The Importance of Collective Capacity Building for Successful Strategic Maritime Partnerships
by Rear Admiral Ryo Sakai, DG Operations & Plans, Japanese Maritime Self Defence Force
The Challenges that need to be addressed in achieving Strategic Maritime Partnerships
by Vice Admiral Syed Arif Ullah Hussaini Commander Pakistan Fleet, Pakistan Navy
The Dynamics of Evolving Maritime Security Partnerships in the Indo-Asia-Pacific
by Prof. Geoffrey Till, Chairman of Maritime Policy Studies, Corbett Centre, UK
Maritime Partnerships and the Critical Importance of Developing Interoperability
by Rear Admiral Peter Laver Commander Maritime Border Command, Australian Navy
Harmonizing Strategic Maritime Partnerships in the Indo-Pacific; Counter Balancing the Maritime Power Players
by Dr. Vijay Sakhuja, Director, National Maritime Foundation
Maritime Security in the Indo-Pacific : ReCAAP Roadmap
by Mr. Toong Ka Leong, Senior Manager Ops & Programme, ReCAAP*
*Regional Cooperation Agreement on Combating Piracy and Armed Robbery against Ships in Asia
Chapitre V
Contre-point : le dispositif militaire français en Indo-Pacifique
Comme le notait Anthony Bergin, directeur-adjoint de l’ASPI, Australian Strategic Policy Institute, dans un article (France : Australia’s regional partner ? https://www.aspistrategist.org.au/france-australias-regional-partner/) publié le 4 février 2014 dans The Strategist, organe de l’ASPI, « While France mightn’t automatically come to mind as a regional partner, there’s already a lot going on between our two countries, and plenty of future opportunities ». L’article évoque les différentes activités auxquelles la France contribue dans les océans Indien et Pacifique (participation aux différentes organisations régionales, surveillance maritime, secours en mer, gestion des pêcheries, etc.), tout en souhaitant qu’elle y soit plus présente et exprime un souhait : « Il serait […] utile pour la France de formaliser davantage ses activités régionales ».
Coïncidence probablement, deux mois plus tard, le 10 avril 2014, la Délégation aux affaires stratégiques du ministère français de la défense présentait la politique de défense et de sécurité de la France en Asie-Pacifique et publiait un document, apparemment le premier du genre destiné au grand public, intitulé « La France et la sécurité en Asie-Pacifique ». M. Jean-Yves Le Drian, ministre de la défense, remettait à ses homologues de la 15e édition du Shangri-La Dialogue – organisé annuellement à Singapour par l’International Institute for Strategic Studies – le rapport suivant publié en juin 2016 sous le même titre. Cette seconde édition du document de référence sur la politique de défense française en Asie-Pacifique, « La France et la sécurité en Asie-Pacifique » témoigne « de l’engagement fort de notre pays à développer sur le long terme avec les États de la région des interdépendances utiles ainsi que des actions conjointes au bénéfice de notre sécurité commune ». Dans son discours prononcé le 5 juin 2016 devant les participants du Shangri-La Dialogue, M. Jean-Yves Le Drian, mettait l’accent sur le fait que la question de la stabilité en Asie-Pacifique, n’était pas un sujet théorique : « C’est un sujet concret qui mobilise toute une partie de mon ministère dans les domaines de la réflexion stratégique, du suivi des évolutions régionales, du dialogue avec nos partenaires, des activités de renseignement, de la planification et de la conduite opérationnelle ».
Par ailleurs, dans l’introduction de la version 2016 du document La France et la sécurité en Asie-Pacifique, le ministre observait que « l’évolution des équilibres stratégiques s’était accélérée en Asie et dans l’espace indopacifique ». Après avoir évoqué l’ensemble des « menaces de la force » et des « risques de la faiblesse » émanant de cette région, il concluait « En somme, l’ensemble géopolitique formé par l’Asie et l’espace indopacifique, foyer de dynamisme économique, de croissance démographique et d’innovation technologique, constitue une source de prospérité globale présentant des vulnérabilités ».
Les partenariats stratégiques de la France dans la région (extrait de La France et la sécurité en Asie-Pacifique, p. 14). La France a conclu des « partenariats stratégiques » comprenant un volet relatif aux questions internationales de défense et de sécurité, avec le Japon (1995, élevé au niveau ministériel en 2012), la Chine (1997), l’Inde (1998), l’Indonésie (2011), l’Australie (2012), Singapour (2012) et le Vietnam (2013). Si chaque partenariat stratégique est spécifique et peut même prendre des dénominations différentes selon les États avec lesquels il est noué, il demeure dans tous les cas un engagement politique fort.
Avec l’Australie et l’Inde, la France a développé un partenariat de premier plan, fondé sur des valeurs et des intérêts communs, organisé autour de dialogues stratégiques, d’une coopération militaire particulièrement dense et d’une coopération d’armement exceptionnelle. Paris et Canberra, déjà engagées conjointement au Moyen-Orient, en océan Indien et dans le Pacifique, ont donné en avril 2016 un élan sans précédent à leur relation stratégique qui bénéficiera à la sécurité dans l’ensemble de la région. Cette dynamique pourra renforcer la relation privilégiée entretenue avec New Delhi qui se traduit notamment par des exercices annuels majeurs dans le domaine naval (Varuna), aérien (Garuda) et terrestre (Shakti).
Avec le Japon, la France a conclu un « partenariat d’exception » qui offre des perspectives de coopération accrues sur la scène internationale depuis l’évolution de l’interprétation de la Constitution japonaise par Tokyo. Vis-à-vis de ces pays, la France bénéficie à la fois de l’atout que constitue son alliance étroite avec les États-Unis, mais aussi de son autonomie stratégique.
Avec Singapour, la France entend inscrire son partenariat de confiance dans la durée via le renforcement continu de la coopération bilatérale en matière de R&T de défense ou encore l’entraînement des forces aériennes singapouriennes en France.
Plus récemment, la Malaisie est devenue un partenaire proche de la France, à travers un dialogue politique dense (Haut comité stratégique conjoint de défense de niveau ministériel) et une coopération de défense exemplaire, qui a notamment permis la constitution de la force sous-marine malaisienne.
Dans le Pacifique Sud, la France a développé avec la Nouvelle-Zélande une relation spécifique, fondée sur une convergence d’analyses et d’intérêts stratégiques. Les relations entretenues avec ses voisins australien et néozélandais sont à l’origine de l’organisation en Nouvelle-Calédonie, en 2015, du premier séminaire interministériel trilatéral consacré à la surveillance maritime régionale.
Les forces navales françaises dans l’Indo-Pacifique (selon les sources du ministère de la défense mises à jour en septembre 2016).
La France a initié un rééquilibrage de son centre de gravité stratégique vers l’Indopacifique dont elle est une puissance riveraine. Puissance maritime de premier plan, ses forces de souveraineté outre-mer et ses implantations militaires permanentes en océan Indien et dans le Pacifique lui assurent une présence unique parmi les pays européens. La France participe à diverses enceintes de coopération régionale spécialisées sur les questions maritimes, tant dans l’océan Indien – Indian Ocean Naval Symposium – que dans le Pacifique : Pacific Coast-Guard Forum, Western Pacific Naval Symposium. La France est par ailleurs membre fondateur de la Commission de l’océan Indien et partenaire du dialogue de l’Indian Ocean Rim Association for Regional Cooperation.
Son dispositif régional repose sur trois « forces de souveraineté », chargée de garantir la protection du territoire national et d’animer la coopération régionale :
- Les forces armées de la zone sud de l’océan Indien, FAZSOI. Avec 1 600 militaires des trois armées elles constituent le point d’appui principal du théâtre« océan Indien ». Pour mémoire : la lutte contre la piraterie – Somalie, golfe d’Aden – et la participation à l’opération européenne Atalante.
Les moyens mis en œuvre par la marine nationale : base navale de La Réunion, avec deux frégates de surveillance – chacune dotée d’un hélicoptère Panther ; un patrouilleur ; une vedette côtière de surveillance de la gendarmerie maritime ; à Mayotte : une vedette côtière de surveillance de la gendarmerie maritime ; une vedette ; un chaland de transport de matériel.
En outre : un régiment parachutiste d’infanterie de Marine à La Réunion et un détachement de Légion étrangère à Mayotte ; un escadron de transport équipé de deux avions de transport Casa CN 235.
- Les forces armées de la Nouvelle-Calédonie, FANC. Avec 1 450 militaires des trois armées, elles constituent le principal point d’appui aéroterrestre du théâtre « Pacifique », en lien avec lesforces armées en Polynésie Française (FAPF).
Les moyens mis en œuvre par la marine nationale : base navale de Nouméa, avec une frégate de surveillance (+ un hélicoptère) ; deux patrouilleurs ; une vedette de la gendarmerie maritime ; des éléments de protection (fusiliers marins en unité tournante) ; deux avions de surveillance maritime Gardian Falcon F200.
En outre, un régiment d’infanterie de marine, un escadron de transport équipé de deux avions de transport tactique Casa CN 235 et trois hélicoptères de manœuvre Puma.
- Les forces armées en Polynésie française, FAPF. Avec 900 militaires des trois armées, elles constituent le principal point d’appui à dominante maritime du théâtre « Pacifique », en lien avec lesforces armées en Nouvelle Calédonie.
Les moyens mis en œuvre par la marine nationale : base navale de Papeete, avec une frégate de surveillance (+ hélicoptère) ; un patrouilleur de service public ; trois avions de surveillance maritime Guardian ; deux hélicoptères Dauphin N3.
En outre, un régiment d’infanterie de marine et un escadron de transport de deux avions de transport tactique Casa CN 235
Récapitulation des moyens mis en œuvre dans la région indo-pacifique (les zones économiques exclusives de la France y couvrent 11 millions de km2)
- Effectif total : 3 950 militaires des trois armées
- Marine : 4 frégates de surveillance classe Floréal mises en service entre 1992 et 1994 (2.900 tonnes, distance franchissable : 10.000 milles à 15 nœuds – vitesse maximale : 20 nœuds –, autonomie : 50 jours) ; 4 patrouilleurs ; 4 vedettes côtières de surveillance ; 1 chaland de transport de matériel ; 6 hélicoptères, 1 élément de protection – fusiliers marins en unité tournante.
- Armée de l’air : 6 avions de surveillance maritime Gardian Falcon
- Armée de terre : 3 régiments d’infanterie de marine et 1 détachement de la Légion étrangère.
- Rémi Perelman, Asie21
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