Taïwan – Chine   Reconnaître ses erreurs ou se dire infaillible : lectures de l’Histoire à Taïwan et en Chine 

Le 9 décembre 2018, le gouvernement taïwanais a procédé à une action aussi rare qu’importante et méritoire en reconnaissant ses erreurs et errements lors de la terreur blanche. Cette capacité taïwanaise d’affronter les démons de son passé tranche avec la situation en Chine où la mythologie mémorielle est aussi forte que jamais et concerne non seulement le récent passé maoïste mais même le passé plus lointain de l’empire Qing sur lequel Pékin veut imposer son propre récit.

On December 9, 2018, the Taiwanese government carried out an action as rare as it is important and meritorious, recognizing its errors and mistakes during the White Terror. This Taiwanese ability to confront the demons of its past contrasts with the situation in China where the memory mythology is as strong as ever and concerns not only the recent Maoist past but even the more distant past of the Qing Empire on which Beijing wants to impose his own story.

FAITS

Le 9 décembre 2018, le gouvernement taïwanais a procédé à une action aussi rare qu’importante : lors d’une cérémonie en présence du vice-président DPP Chen Chien-jen, 1 505 personnes qui avaient été injustement condamnées à l’époque de la « Terreur blanche » ont été réhabilitées. C’est un des premiers résultats de la Commission de la justice transitionnelle depuis sa mise en place en décembre 2017. Rappelons que l’arrivée du KMT à Taïwan a coïncidé avec deux événements traumatiques : le massacre du 28 février 1947 qui aurait fait plus de 20000 morts, suivi de la « Terreur Blanche », liée à la loi martiale s’étendant de 1949 à 1987, qui a conduit à plus de 3000 exécutions arbitraires et 140000 emprisonnements. La décision du gouvernement taïwanais de la, sous présidence DPP, d’analyser de façon objective cette histoire en reconnaissant ses fautes révèle la maturité politique de l’île.

La situation contraste fortement avec ce qu’il en est en Chine encore aujourd’hui. En Chine, le tabou reste fort en ce qui concerne le « Grand bond en avant » qui a été marqué par une crise économique entraînant la mort de 36 millions de personnes, la « Révolution culturelle » et son « nettoyage politique » provoquant la mort de plus de 5 millions de personnes et bien sûr le massacre de Tiananmen qui, selon certaines estimations récentes aurait fait 10 000 victimes. Le plus récent épisode de cette volonté de contrôler l’histoire semble presque comique : le vendredi 25 janvier le Beijing Daily a publié sur son compte Weibo une liste des « cinq impacts négatifs » que des séries-télés très populaires et situées à l’époque des Qing auraient sur le public chinois. Les « cinq impacts négatifs » des séries-télés seraient les suivants :

  1. susciter l’admiration pour le style de la vie de palais ;
  2. montrer les intrigues de lutte pour le pouvoir ;
  3. éclipser la gloire des leaders de la Chine actuelle ;
  4. encourager la recherche du luxe ;
  5. encourager le matérialisme consumériste.

Les critiques 1, 4 et 5 faites au nom de la frugalité  […]

 Jean-Yves Heurtebise, Asie21

Extrait de la Lettre confidentielle Asie21-Futuribles n°125 février 2019

Acheter l’article

abonnement en ligne

 

Lire également Taiwan : Han Guo-yu révélateur de l’échec du gouvernement Tsai Ying-wen

Laisser un commentaire