Indonésie : La menace radicale est prise au sérieux
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Réputée pour son Islam tolérant, syncrétique et modéré, l’Indonésie est sous la pression de groupes liés, de près ou de loin, avec des mouvements extrémistes. Ces groupes exercent une pression constante et demandent au gouvernement du président Joko Widodo « un plus grand respect de l’Islam ». Leur objectif est de renforcer l’identité musulmane du pays à travers des politiques discriminatoires, voire la mise en œuvre de la charia. À terme, la légitimité du président pourrait être défiée par ces groupes qui occupent de plus en plus l’espace public, l’obligent à des contorsions politiques et surtout éloignent son attention réformatrice et les ressources nécessaires à la modernisation du pays. Par effet de ricochet, ce n’est pas seulement le succès ou l’échec de l’administration Jokowi qui est en jeu, c’est aussi la stabilité du pays, voire l’avenir d’une transition démocratique qui reste à conforter.
Description
FAITS
On assiste depuis plusieurs années à une lente réislamisation de la société indonésienne dont les signes extérieurs s’accumulent : le nombre de femmes voilées augmente, celui de banques islamiques se multiplie, les produits halal sont dominants et le nombre de médias (magazines autant qu’applications pour téléphone mobile) ne cessent d’attirer. Aujourd’hui, la religion a envahi le domaine public.
Les actions violentes entreprises à l’égard des minorités religieuses sont devenues non seulement plus courantes mais revendiquées comme un moyen de faire prévaloir un islam plus strict et plus intolérant. Qu’il s’agisse d’attaques contre les chrétiens (églises fermées), les hindous ou certaines sectes musulmanes (les Baha’is, Ahmadiyah, Shia ou Sufi, qualifiés « d’infidèles »), ces initiatives entretiennent un climat de crainte et de tensions. En janvier 2015, une enseignante musulmane a été menacée de mort pour avoir organisé une visite pédagogique dans une église protestante.
L’été dernier, une vidéo a circulé sur Youtube montrant des combattants indonésiens en Syrie (les services de renseignement annoncent près de 550 combattants pour ISIS en Syrie) qui appelaient leurs frères musulmans à rejoindre leur combat. De sa prison, Abu Bakar Bashir, membre de la Jemmaah Islamya […].
Sophie Boisseau du Rocher, Asie21
Extrait de la Lettre confidentielle Asie21-Futuribles n°85 juin 2015