Les États-Unis, moteur et frein de l’émergence asiatique
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Description
Questions internationales no 93 – septembre-octobre 2018
DOSSIER La Chine au coeur de la nouvelle Asie
Jean-Raphaël Chaponnière a été ingénieur au CNRS, chercheur à l’ISEAS (Singapour), expert au National Economic Board (Bangkok), chercheur à l’INSEAD, conseiller économique en Corée et en Turquie, et économiste à l’AFD. Il est membre d’Asie21 (Futuribles).
Le conflit commercial qui a débuté au printemps 2018 entre Washington et Pékin n’est pas le premier qui oppose les États-Unis à un pays asiatique. Mais, pour la première fois depuis la Seconde Guerre mondiale, les Américains font face à un pays qui peut leur tenir tête.
Décidée à l’époque de la guerre froide et poursuivie au cours des décennies suivantes, l’ouverture américaine aux produits asiatiques a favorisé la croissance de la région, du Japon à la Chine en passant par la Corée du Sud et l’Asie du Sud-Est. Au fil des ans, les relations commerciales se sont intensifiées. Elles relèvent dorénavant moins de la concurrence que de la complémentarité au sein des chaînes globales de valeur.
Les États-Unis, puissance du Pacifique
Au XVIIIe siècle, Américains et Asiatiques partagent un même antagonisme envers la Compagnie (britannique) des Indes orientales. Déclenchée par un impôt sur le thé, la « Boston Tea Party » marque le premier acte de la guerre d’indépendance américaine. Libérés de la tutelle britannique et confrontés au blocus anglais sur le commerce avec les Caraïbes, des marchands américains s’embarquent vers l’Asie. Ils exportent des peaux de loutre et du ginseng vers la Chine, achètent du sucre aux Philippines, se procurent de l’opium dans l’Empire ottoman pour le vendre en Chine. Le commerce avec l’Asie suit l’ascension de l’influence des États-Unis dans le Pacifique 1 et la montée en puissance de leur économie. Entre 1870 et 1940, la part de l’Asie dans les échanges américains augmente de 5 % à 25 %, un pourcentage qu’elle retrouvera dans les années 2000. Premier partenaire asiatique des États-Unis jusqu’en 1880, la Chine cède la place au Japon qui, durant l’ère Meiji, s’industrialise en s’inspirant du « système américain » 2 et devient le quatrième exportateur mondial dans les années 1930. Les échanges nippo-américains ralentissent avec la détérioration des relations entre Tokyo et Washington à propos des modalités d’ouverture de la Chine qui est la […]